Le marin contrepétant
(Passer lentement la souris sur le problème, sans cliquer, fait apparaître la solution.)
Le commandant l’ayant fait mander à bord, le capitaine de corvette Jules Wacquin rejoignait le port. De loin le phare paraissait d’or. Longeant la rue du Quai il appréciait l’odeur de marron, forte à l’approche du quai.
- Hélas ! Les vacances s’achèvent. Quelle perm’ aux effluves stanniques! Songeait le corvettard, heureux malgré tout de rejoindre ses amis et d’autres crevards aux dettes immenses.
Toute sa jeunesse avait été bercée d’histoires d’abordage. Mille milliard de sabords ! En avait-il rêvé, alors qu’il était encore au nombre de ces ados minables accrochés à leurs bars, de gloire maritime et de vie d’aventure.
Sans doute faut-il être bien tordu pour rêver de survoler l’abîme. Pourtant, en avait-il arpenté des iles désertes où les plages étaient vertes ! Où des mutins chiquaient pour tout dopage et exhibaient des sabres terribles ! En avait-il commandé des navires au temps des moussons, quand la vigie, sous l’averse joyeuse, se tient coite et mouillée ! Ah ! Etre assommé par une baume, voilà qui est digne des mythes ; d’un corsaire qui n’a pas l’âge de tout cacher. En avait-il pourchassé de ces pirates qui entassent des pécules dans des coffres pleins de pierres fines, pierres qu’ils confondent avec leurs rapines ! De ces pirates qui espèrent la nuit noire pour camoufler leur pale sillage et trouvent embêtant que des plages vertes s’irisent de feux lunaires déchirés par leur quille.
Une vigie coite et mouillée
Puis, le boutre étant à foire, il avait acquit son premier bateau : ôtez les frais, le boutre est à vous pour une poignée de doublons, encore qu'il dût se payer l'écoute lui même ; rapidement il le troqua contre une pinasse assez fugueuse. Passion de jeunesse. Mousse, avec l'espérance de quelque palace aux Indes, il s'était laissé embarqué. On ne l'y reprendrai plus ! Jeune pousse à la belle mine, il entra à l'École.
Passés trois ans à contempler les divers sites de Lanvéoc-Poulmic et le balcon de l’épouse du pape (un pape hautain qui ne craignait pas les cloques), à apprendre comment faire des nœuds avec des amarres de poupe et il avait reçu sa commission d'officier à l'été 2014.
Enfin il découvrit la vie embarquée, la vie de carré.
Fièrement affiché à la porte du carré des officiers l’ordre du jour n°69 du vice amiral, inspiré par le Guide de la morale, prévient : « Décence : il est interdit de pénétrer les carrés sans culotte.» Autour d’un punch le capitaine raconte des histoires de malins qui riment, de filles et de goélettes et comment il se trouve bien en peine avec celles qui sont à voile. (Parfois même doit-il payer pour les voir à voile, encore que celles à voiles ne soient pas toujours en pile.) Le steward range d’impeccables uniformes aux plis bien vantés : tous ces effets mineurs tant tâtés dans la carré des officiers, c’est vraiment l’équipe des copines (l’équipe pas récente). Ici chaque pote a sa marine. Au demeurant rien que des beaux gosses. Le mousse rêve de servir de guide à toutes ces mâles beautés. Ah ! le prestige de l’uniforme ! Est-ce lui qui fait grimacer quelques passagères quand le skipper recommande aux matelots de ne pas cogner les ponts?
Des dunettes ou prendre le quart
La maitresse du capitaine au long cours fait inspecter la soute sans motif. Seuls des vents hardis peuvent l’affaler sur le môle. Elle jure comme taulière mal aimée, mais ne veut pas choquer l’écoute. L’aviateur appontait en survolant le quai au grand dam du chasseur de mouettes qui encageait sur la grand’ vergue. Pour le bosco, qui a perdu ses godasses dans il ne sait quelle rade, la godille s'est tachée. Les barreurs, qui mouillent des cordes, se font des idées en virant. Ce gabier aime fouiller les quilles, il est chien ! Le marin admire comment les vigies passent dans le nid de pie (double permutation). Au large, le capitaine régate avec des pulls et prend le vent comme un ami, car, quand les voiles faseyent, les pans glandouillent.
Mais toujours reste à l’honneur la fière devise de la Royale : «Marine est à la peine.» ou, comme l’on dit du côté des humanitaires : «Marine pour la paix.» En montant, la marée bouscule l’assiette du navire, succombe à son vœu et l’initie au pilotage. La marieuse recommande de ne pas approcher la Chine.
Sur la plage arrière le gabier s’est tordu la pelle en jouant avec une gamine. Gamine, c’est vite dit ! Elle préfère déjà la marine à la pelle.
Le second encalminé après une mauvaise chute.
Le capitaine mate la flotte, mais qu’a-t-il ramé au milieu de la flotte ? :
- Hardi ! Nous ne sommes point ici abord du Clem., craignant encore le vol de l’amiante !
Des fonds curieux
Le gredin ressemble à un lard trop gras pour assurer l'embossage.
Les plongeuses font palmer leurs potes et s’élancent vers des fonds curieux. Le pilotin breton porte son bob à la manière des gens aisés. Le bosco, toujours disponible pour vérifier la vigueur d'un ris, encourageait le mousse : « allez mon vieux cageot, vas-tu l’apiquer c’te vergue ! Ou ça te nuit ? Droit dans l’écubier comme disait le gars !» Le second embraque, tout en haut, comme un homard.
- Embraquer au su de tous, ricane le corvettard, c’est surement faire raidir un cordage.
Ce drôle de coco est bien maladroit en manipulant les guindes mais s'applique volontiers à rincer les mats.